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Titre du blog : scénario-en-ligne
Auteur : auteurscenariste
Date de création : 02-11-2014
 
posté le 03-11-2014 à 10:44:47

UN IMPOSSIBLE RÊVE – Scénario dialogues 9

 

 

 

Scène 225 – PLATEFORME SALLE DE SOURIS – INT/ JOUR

 

Plateforme. Salle des souris. EUROPE entre dans une pièce carrelée, dans laquelle, sur un alignement de tables, de grandes cages sont disposées les unes à côté des autres. Toutes sont habitées par d’innombrables souris blanches. Elle se penche un instant pour regarder les souris, puis sort de la pièce et referme la porte. 

 

 

 

Scène 226 – PLATEFORME COULOIR –  INT/JOUR (passage à INT/NUIT)

 

Plateforme. Couloir. Vu du couloir, PIERRE GERMONT qui est sur le pas de porte du dortoir, parle avec EUROPE, qui s’est assise sur un lit du dortoir. 

 

 

PIERRE GERMONT

 

Vous avez trouvé là une distraction. Mais j’imagine, qu’il vous en faudra d’autres au cours de la journée. Je peux vous apporter de la lecture, une radio, une télé… 

 

 

EUROPE

 

Je n’ai envie de rien. J’ai juste envie de sommeil et de liberté. 

 

 

PIERRE GERMONT

 

Un ordinateur, alors… Ce serait déjà une fenêtre sur la liberté, non ?

 

 

EUROPE

 

Je ne sais pas si je dois vous remercier pour vos efforts, Monsieur Germont, mais je crains malheureusement, qu’ils ne soient pas vraiment capables d’améliorer ma condition. 

 

 

PIERRE GERMONT

 

Ma condition n’est pas beaucoup plus enviable que la vôtre. Je vais devoir, quant à moi, passer la nuit dans ce couloir, tout simplement parce que j’ai des scrupules à vous enfermer à clef. Vous devriez penser un peu plus souvent aux causes humaines qui nous obligent à agir ainsi. 

 

 

EUROPE

 

Vous ne voyez pas que je fais un effort ?

 

 

PIERRE GERMONT

 

Si ! je le vois. Maintenant, j’aimerais bien l’entendre… 

 

(Le professeur s’interrompt. Un homme, LE DOCTEUR, portant une blouse blanche et un stéthoscope sur l’épaule, surgit du fond du couloir. Il tient une petite mallette dans une main). 

 

Je vais devoir vous laisser, le médecin arrive. Mais comme vous le savez, je ne suis pas loin.

 

(Il indique une porte voisine).  

 

Si vous avez besoin de quelque chose, vous pouvez venir me voir à tout instant. Il vous suffit de frapper à cette première porte, qui est juste à droite quand vous sortez. 

 

 

PIERRE GERMONT salue le médecin et recule pour le laisser entrer dans le dortoir. La porte de la chambre se referme. PIERRE GERMONT sort une clef et ouvre la porte de la pièce d’à côté. La porte de la pièce d’à-côté se ferme à son tour. Plan d’ensemble du couloir avec la porte du fond en arrière champ. Le couloir est désert et silencieux. La porte du fond s’ouvre et Le DOCTEUR sort. 

 

 

Le DOCTEUR (avant de refermer la porte / au loin) 

 

Reposez-vous bien, Mademoiselle. 

 

 

Bruit d’un chariot métallique. Le chariot est poussée par une DAME de SERVICE. Sur le chariot, le couvert d’une personne, avec une assiette recouverte d’une cloche. La DAME de SERVICE croise le DOCTEUR, qui s’en va (sortie de champ) et se dirige vers la porte du fond. Elle frappe à la porte. 

 

 

DAME de SERVICE

 

Madame… C’est votre repas. 

 

 

La DAME de SERVICE entre dans la chambre et referme la porte. L’instant d’après, la porte s’ouvre à nouveau. LA DAME de SERVICE sort en poussant un chariot vide. (Elle sort du champ). Arrive le GARDIEN, qui tient un ordinateur portable à la main. Le GARDIEN vient frapper à la porte de la salle où s’est installé PIERRE GERMONT. 

 

 

Le GARDIEN 

 

Monsieur Germont ? J’ai votre ordinateur…

 

 

La porte s’ouvre. Le GARDIEN entre et ressort aussitôt après. La porte se referme, mais s’ouvre l’instant d’après. PIERRE GERMONT sort en tenant l’ordinateur sous un bras. Il s’approche de la porte du dortoir et frappe. Aucune réponse. Il ouvre la porte avec prudence. Dans l’entrebâillement, EUROPE, sur un lit, en train de dormir, les cheveux défaits. PIERRE GERMONT referme la porte et retourne dans sa salle. Vue du couloir, une fenêtre du hall d’accueil. Par la fenêtre, en accéléré, arrivée de la nuit. La lumière du couloir s’allume. S’ouvre la porte de la pièce où se trouve PIERRE GERMONT. PIERRE GERMONT sort en prenant une chaise. Il pose la chaise, à l’entrée, devant la porte du dortoir. Il repart et revient avec une autre chaise, une couverture et un journal. Il s’assoit sur une chaise, pose les pieds sur l’autre et étale la couverture sur ses jambes. Il déplie son journal pour le lire. La porte d’une salle voisine s’ouvre. Sort un JEUNE LABORANTIN, qui tient dans une main, un thermos et une tasse et dans l’autre, un carnet et un stylo. Le JEUNE LABORANTIN va à la rencontre de PIERRE GERMONT.

 

 

JEUNE LABORANTIN

 

Bonjour Monsieur. Je cherche des volontaires pour tester une nouvelle tisane calmante. 

 

 

PIERRE GERMONT (sans détacher son regard du journal)

 

Je veux bien goûter.

 

 

JEUNE LABORANTIN (en versant la tisane)

 

Vous devez tout boire et ensuite me donner une note de 0 à 5, pour le goût. 

 

 

PIERRE GERMONT boit la tasse et se met à grimacer.

 

 

PIERRE GERMONT (en rendant la tasse) 

 

Zéro

 

(Le JEUNE LABORANTIN note sur son carnet). 

 

Vous êtes le dernier ?

 

 

JEUNE LABORANTIN

 

Oui.

 

PIERRE GERMONT

 

Pouvez-vous éteindre la lumière du couloir au moment où vous partez ?

 

 

JEUNE LABORANTIN

 

Pas de problème.

 

 

Le JEUNE LABORANTIN s’en va. PIERRE GERMONT pose son journal sur le sol et remonte la couverture. La lumière du couloir s’éteint. 

 

 

 

Scène 227 –  PLATEFORME DORTOIR – INT/NUIT

 

Plateforme. Dortoir. EUROPE est allongée sur le lit, dans ses vêtements de jour, les cheveux défaits. Soudainement, elle redresse la tête, reste un instant à l’affût du bruit. Elle allume une veilleuse située près du lit et s’assoit, le temps de reprendre ses esprits. Elle décide de se lever, avance en tapinois vers la porte de sortie. Elle entrouvre la porte et aperçoit dans l’entrebâillement, PIERRE GERMONT endormi sur les deux chaises placées juste devant sa porte. Elle referme doucement la porte. Elle fait le tour de la table, d’un air réfléchi, tout en jetant un œil sur le plateau repas, resté sur place, avec la cloche posée sur l’assiette. Elle décide d’aller dans les sanitaires.

 

 

 

Scène 228 –  PLATEFORME SANITAIRES – INT/NUIT

 

Plateforme. Sanitaires. EUROPE trempe sa tête dans le lavabo, où coule un filet d’eau. Elle nettoie son visage. Elle se redresse comme saisie par une idée soudaine. Elle ferme le robinet, essuie son visage à la hâte  et sort. 

 

 

 

Scène 229 – PLATEFORME DORTOIR –  INT/NUIT

 

Plateforme. Dortoir. EUROPE arrive dans le dortoir. Elle s’approche de la porte d’entrée et  pose son oreille sur le battant. Elle se dirige vers la porte de la salle des souris. Elle reste un instant hésitante et, soudainement, ouvre grand la porte. 

 

 

 

Scène 230 – PLATEFORME SALLE des SOURIS – INT/NUIT

 

Salle des souris. EUROPE allume et se dirige précipitamment vers les cages de souris. Elle  tente d’ouvrir les portes, en les secouant, sans y parvenir, remarque qu’il y a des sécurités. Elle enlève les sécurités, ouvre les portes, les unes après les autres, fait sortir les souris. Les souris, par centaines, puis par milliers, courent sur les tables, arrivent sur le sol et filent vers la pièce voisine. EUROPE les dirige vers la sortie. Puis elle prend une souris entre les mains et retourne dans le dortoir. 

 

 

 

Scène 231 – PLATEFORME DORTOIR – INT/NUIT

 

Plateforme. Dortoir. EUROPE qui tient la souris dans une main, s’approche de la table où se trouve la cloche du repas. Elle met la souris sous la cloche. Avec un couteau, elle fait quelques trous sur la cloche (en plastique). Elle va vers le lit, prend un oreiller et un rouge à lèvres dans son sac à main. Elle écrit un mot sur l’oreiller avec le rouge à lèvres et pose l’oreiller contre la cloche (mot pas tout de suite visible). Elle regarde vers le sol et remarque que les souris ont envahi tout l’espace. Elle va vers la porte d’entrée, l’entrouvre et pousse le flot des souris vers l’extérieur. Elle renouvelle ses efforts plusieurs fois, jusqu’à constater que le couloir est entièrement envahi. A son tour, elle se glisse vers la sortie. Par un mouvement panoramique, on découvre le mot au rouge à lèvres sur l’oreiller : « Ma remplaçante ». 

 

 

 

Scène 232 – PLATEFORME COULOIR – INT/NUIT

 

Plateforme. Couloir. EUROPE avance doucement, dans la pénombre, en rasant les murs. A chacun de ses pas, elle veille à ne pas écraser des souris. Elle passe devant les pieds du professeurs, qui continue de dormir. Elle atteint le bout du couloir et se dirige vers l’accueil. Au même instant, elle croise le GARDIEN qui, malgré les souris, tente de rejoindre le couloir.

 

 

Le GARDIEN (une fois dans le couloir)

 

Monsieur Germont ! Monsieur Germont ! 

 

 

PIERRE GERMONT, qui se réveille, enlève ses pieds de la chaise et retire la couverture. EUROPE réussit à s’échapper vers l’accueil. 

 

 

 

Scène 233  PLATEFORME ACCUEIL – INT/NUIT

 

Plateforme. Accueil. EUROPE traverse l’accueil, qui commence à être envahi, à son tour, par les souris. Elle se précipite vers la porte de sortie et sort.

 

 

 

Scène 234 – PARKING PLATEFORME – EXT/ NUIT

 

Parking de la plateforme. EUROPE court sur le parking de la plateforme. Elle va sur la route pour arrêter les voitures. Une voiture s’arrête. Elle monte dedans. 

 

 

 

Scène 235 –  SALON/SALLE A MANGER APPARTEMENT d'EUROPE – INT/NUIT

 

Appartement d’EUROPE. Salon / Salle à manger. Des cartons empilés au milieu d’une pièce à moitié vide. EUROPE finit d’emballer les objets, bibelots et livres de son salon. Par instants, elle se fige pour voir si elle entend du bruit à l’extérieur. Un moment, elle se lève et s’approche de la baie vitrée de son salon. Elle regarde avec discrétion, à l’extérieur. Elle revient vers ses cartons pour poursuivre son emménagement. Elle s’arrête, à nouveau, en remarquant son portable posé sur une table basse. Elle se lève et part dans la cuisine.

 

 

 

Scène 236 – CUISINE APPARTEMENT d'EUROPE – INT/ NUIT

 

Appartement d’EUROPE. Cuisine. EUROPE ouvre des placards, prend des poêles et casseroles, les empile et revient vers la pièce principale.

 

 

 

Scène 237 – SALON/SALLE A MANGER APPARTEMENT d'EUROPE – INT/ NUIT, puis JOUR.

 

Appartement d’EUROPE. Salon / Salle à manger. EUROPE range les poêles et casseroles dans des caisses. Elle se redresse, regarde la grande baie, aperçoit les premières lueurs de l’aurore. Une nouvelle fois son regard fixe le téléphone portable sur la table basse. Puis d’un mouvement vif, elle détourne le regard et repart dans la cuisine. 

 

 

 

Scène 238 – SALON/SALLE A MANGER APPARTEMENT d'EUROPE – INT/JOUR

 

Appartement d’EUROPE. Salon / Salle à manger. EUROPE, près de l’entrée, téléphone. Tout en téléphonant, elle surveille les bruits extérieurs. 

 

EUROPE 

 

Oui, bonjour Monsieur. Je souhaite avoir un taxi. C’est pour aller à l’aéroport…

 

 

Sa conversation terminée, EUROPE repose son téléphone sur la table basse. 

 

 

 

Scène 239 –  AÉROPORT, HALL des DÉPARTS – INT/JOUR

 

Aéroport. Hall des départs. EUROPE pousse un chariot avec ses valises. Elle se dirige vers un comptoir d’enregistrement. Deux policiers en uniforme viennent vers elle. Le PREMIER POLICIER l’interpelle.

 

 

PREMIER POLICIER 

 

Vous êtes bien Europe Spartanikès ?

 

 

EUROPE

 

Oui.

 

 

PREMIER POLICIER

 

Veuillez nous suivre, Mademoiselle. Vous êtes interdite de sortie du territoire.

 

 

EUROPE (ébahie)

 

Quoi !

 

 

 

Scène 240 –  CHAMBRE APPARTEMENT d'EUROPE –INT/JOUR

 

Appartement d’EUROPE. Chambre. EUROPE pose une valise sur le lit  (une des valises de la séquence précédente) et l’ouvre. Elle prend ses vêtements dans l’armoire et les range dans la valise. Elle interrompt son geste, saisie par une crise de larmes. Elle s’effondre en pleurs sur son lit.

 

 

 

Scène 241 – SALON/SALLE A MANGER APPARTEMENT d'EUROPE – INT/JOUR

 

Appartement d’EUROPE. Salon / Salle à manger. EUROPE sort de la chambre avec deux valises remplies et les place près de l’entrée. Elle prend un sac de voyage et le pose sur les valises. Elle revient vers la table basse, fixe son portable. Elle prend son portable et le glisse dans une poche de son sac à main. Elle va vers la baie et fait descendre un volet automatique.  

Bruit de la sonnette de la porte d’entrée. 

 

 

 

Scène 242 –  ENTRÉE APPARTEMENT d'EUROPE – INT /JOUR

 

Appartement d’EUROPE. Entrée. EUROPE ouvre la porte avec prudence. Elle aperçoit un homme : LE CHAUFFEUR de TAXI.

 

LE CHAUFFEUR DE TAXI

 

Votre taxi est là, Madame. Vous voulez un coup de mains pour les bagages ? 

 

 

EUROPE ouvre la porte plus en grand.

 

 

EUROPE (en se retournant et en désignant ses valises)

 

Mes affaires sont là… 

 

 

LE CHAUFFEUR entre et prend les deux valises et le sacs. EUROPE appuie sur le disjoncteur du compteur. Elle  prend son sac à mains, suit le chauffeur et referme la porte derrière elle. 

 

 

 

Scène 243 –  DEVANT IMMEUBLE APPARTEMENT d'EUROPE / EXT/JOUR

 

Devant l’immeuble de l’appartement d’EUROPE. Un taxi le long du trottoir avec ses warnings. Le CHAUFFEUR de TAXI ouvre une portière arrière et invite EUROPE à prendre place sur la banquette. Il ouvre le coffre et place les valises dans le coffre. EUROPE entre dans la voiture et referme la portière. Le chauffeur referme le coffre et s’installe au volant. 

 

 

 

Scène 244 – TAXI – INT/JOUR

 

Taxi. Le matin. Le CHAUFFEUR de TAXI allume la radio. Petite musique douce. Il met le contact. La voiture démarre. EUROPE jette un œil vers l’arrière. De nouvelles larmes arrivent à ses yeux. Elle les essuie, essaye de se laisser distraire par le paysage urbain. La musique est interrompue par un flash information.

 

 

JOURNALISTE FLASH INFO

 

Nous venons de l’apprendre. Secousse sismique de moyenne amplitude dans la région de Naples. Principalement touché, le parc de Capodimonte, avec son Palais royal ébranlé, de nombreuses chutes d’arbres, ainsi que des poteaux et fils arrachés.

 

 

Saisie par la nouvelle, EUROPE écoute, bouche bée…

 

 

 

Scène 245 –  BATIMENT de LINGUISTIQUE, BUREAU DIRECTEUR – INT/JOUR

 

Bâtiment de linguistique. Bureau de PIERRE GERMONT. PIERRE GERMONT, derrière son bureau, réajuste ses lunettes. Il tient un document à la main. (Extrait de la SEQU. 199).

 

 

PIERRE GERMONT

 

Cette fois, vous allez être informée

 

(En face de lui, EUROPE se tient droite et immobile sur une chaise./ Il lit). 

 

Nous sommes là à Naples, plus exactement dans le parc de Capodimonte.

 

 

 

Scène 246 – TAXI – INT/JOUR

 

Taxi. Troublée, EUROPE passe sa main sur son visage, comme pour essayer d’effacer ses pensées. Elle tourne nerveusement vers la vitre. 

 

 

 

Scène 247 – CENTRE de RECHERCHE – INT/JOUR

 

Salle du Centre de Recherche. PIERRE GERMONT présente à EUROPE, Le « Contrôleur Principal » (Extrait de la SEQU.40).

 

 

EUROPE

 

Que voyez-vous ?

 

 

PIERRE GERMONT

 

On assiste à une montée en puissance, une accélération du phénomène événementiel depuis quelque temps. Cela fait que les événements se dissocient difficilement les uns des autres. Là, cependant, dans six mois environ, un séisme.

 

 

EUROPE

 

En Europe ?

 

 

PIERRE GERMONT

 

Il devrait être de magnitude moyenne. C’est à vérifier.  

 

 

 

Scène 248 – TAXI – INT/JOUR

 

De plus en plus troublée, EUROPE regarde dans un sens et dans l’autre, change sans arrêt de position. LE CHAUFFEUR de TAXI jette un œil dans le rétroviseur.

 

 

Le CHAUFFEUR de TAXI 

 

Quelque chose ne va pas, Madame ?

 

 

EUROPE se fige et fixe l’autoradio qui passe à nouveau une musique douce.

 

 

VOIX OFF de PIERRE GERMONT 

 

Ce sera en fin de compte beaucoup plus long que prévu. Le temps de vous réadapter à une situation normale. Vous avez été coupée du monde pendant six mois environ.

 

 

EUROPE redresse soudainement la tête, comme si elle prenait soudainement conscience qu’on venait de lui poser une question. 

 

 

EUROPE

 

Cela vous est-il déjà arrivé que quelqu’un renonce à son itinéraire et vous demande de faire demi-tour ? 

 

 

Le CHAUFFEUR de TAXI 

 

Dans notre profession, on voit de tout, vous savez. Des demi-tours ? Oui, ça arrive. Souvent, parce que les gens ont oublié un truc important : des clefs, un portefeuille, des billets d’avion… Une fois, pour une famille, c’était le chat. Et il y en a, on ne sait même pas pourquoi. Des gens perturbés, peut-être…

 

 

EUROPE : Alors, vous allez pouvoir m’ajouter à la liste de vos gens qui sont peut-être perturbés. Je vais vous demander de faire demi-tour. 

 

La voiture freine.

 

 

 

Scène 249 – COULOIR CENTRE de RECHERCHE –  INT/NOIR

 

Couloir du Centre de Recherche. EUROPE sort la carte et la met dans le boîtier. La première porte s’ouvre. Elle se dirige vers la seconde porte. Elle tape le code, mais la porte ne s’ouvre pas. Elle essaye une nouvelle fois, sans succès. Elle décide alors de frapper, puis de tambouriner sur la porte. La porte finit par s’ouvrir. EUROPE reconnaît devant elle, JEAN-FRANÇOIS.

 

 

EUROPE

 

Je veux voir Monsieur Germont.

 

 

JEAN-FRANÇOIS

 

Il n’est pas là. Je suis seul ici, en ce moment.

 

 

EUROPE

 

Il est où ?

 

 

JEAN-FRANÇOIS

 

Il a dû partir déjeuner avec les autres, dans leur restaurant habituel.

 

 

EUROPE

 

Non… Je suis allée voir. Il n’y est pas.

 

 

JEAN-FRANÇOIS

 

Alors, dans ce cas, il doit être du côté des hangars…

 

 

EUROPE

 

Des hangars ?

 

 

JEAN-FRANÇOIS

 

Oui. Vous connaissez déjà… Vous y avez été, avec les autres, quand il a fallu expérimenter l’hologramme de la voiture.

 

 

EUROPE

 

Je vous remercie.

 

EUROPE fait demi-tour. 

 

 

 

Scène 250 – HANGARS DÉSAFFECTÉS  – EXT/JOUR

 

Hangars désaffectés. EUROPE fait le tour des hangars et remarque un pré délimité par une clôture. Les barrières du pré rejoignent l’intérieur d’un hangar. EUROPE s’approche d’une barrière et se penche pour tenter d’apercevoir l’intérieur du hangar. 

 

 

EUROPE 

 

Monsieur Germont ! 

 

(Elle s’arrête et écoute. Bruit confus.) 

 

Monsieur Germont !

 

Surgit un taureau blanc. Sur la tête du taureau, une étoile noire. Surprise, EUROPE recule et met ses mains sur sa bouche.  

 

 

VOIX de PIERRE GERMONT

 

Vous voyez… Il existe…

 

EUROPE se retourne  et aperçoit le professeur.

 

 

EUROPE

 

Monsieur Germont…

 

 

PIERRE GERMONT

 

Appelle-moi par mon prénom. 

 

 

EUROPE

 

Je ne pouvais pas t'oublier… 

 

PIERRE GERMONT s’approche d’EUROPE, la prend entre ses bras, et l’embrasse. Bruit d’une voix qui racle la gorge, pour signifier sa présence. PIERRE GERMONT et EUROPE se défont de leur étreinte. Ils aperçoivent le CHAUFFEUR de MONSIEUR CASTILLON qui se tient debout, droit, la casquette à la main. 

 

 

Le CHAUFFEUR

 

Monsieur Castillon veut savoir où l’on doit ranger la Limousine.

 

 

PIERRE GERMONT

 

Et bien, rangez la  dans le hangar. Comme d’habitude.

 

 

Le CHAUFFEUR 

 

Le problème, Monsieur Germont, c’est que ce n’est pas comme d’habitude. Car le hangar est aussi occupé par un animal et je crois bien que c’est un taureau. 

 

 

PIERRE GERMONT 

 

Oui, en effet. J’étais justement en train de placer une barrière… 

 

 

Le CHAUFFEUR 

 

Doit-on attendre que la barrière soit finie d’être placée ?

 

 

PIERRE GERMONT (en se dirigeant vers le pré)

 

Non. Vous pouvez déjà rentrer la voiture. 

 

Le CHAUFFEUR s’éloigne et PIERRE GERMONT enjambe la barrière de l’enclos pour se retrouver de l’autre côté. Il finit par disparaître dans le hangar. EUROPE se retourne. Elle aperçoit la Limousine qui s’engage dans le hangar. L’instant d’après, elle remarque MONSIEUR CASTILLON, qui ressort du hangar en époussetant sa veste. (Un sourire se dessine sur ses lèvres). MONSIEUR CASTILLON, à son tour, la remarque.

 

 

MONSIEUR CASTILLON (en restant à distance)

 

Bonjour Mademoiselle. Sachez que j’ai été enchanté de faire votre connaissance. Maintenant, il me faut regagner ma modeste voiture. 

 

(EUROPE voit MONSIEUR CASTILLON poursuivre son chemin à pied en direction d’une Mercedes. MONSIEUR CASTILLON s’installe au volant de la Mercedes, démarre et arrive à la hauteur de la jeune femme. Sa vitre se baisse.) 

 

Au revoir Mademoiselle. 

 

La vitre remonte. La voiture démarre. L’instant d’après, un motard, Le CHAUFFEUR de MONSIEUR CASTILLON, démarre à son tour en prenant une autre route. EUROPE aperçoit PIERRE GERMONT de l’autre côté des barrières. Elle le rejoint.

 

 

EUROPE 

 

N’est-ce pas le moment ?

 

 

PIERRE GERMONT

 

De quel moment me parles-tu ?

 

 

EUROPE

 

Que j’essaye, pour le taureau…

 

 

PIERRE GERMONT 

 

Veux-tu vraiment voir la différence entre le mythe et la réalité ?

 

 

EUROPE

 

Il n’est pas dangereux, au moins ?

 

 

PIERRE GERMONT  (en regardant le taureau, qui se tient à distance) 

 

Ce midi, il a bien déjeuné, alors ça va… 

 

 

EUROPE (en se mettant sur la barrière)

 

Je veux essayer. 

 

 

PIERRE GERMONT

 

Je ne sais pas si j’ai raison de t’écouter. C’est quand même risqué.

 

 

EUROPE

 

J’accepte de prendre ce risque. J’ai déjà débourré des chevaux, dans mon pays. J’ai même fait un peu de voltige équestre.

 

 

PIERRE GERMONT

 

Mais le dos d’un taureau n’est pas le dos d’un cheval.

 

 

EUROPE

 

Pierre… 

 

(Elle le regarde). 

 

Je voudrais savoir de quoi est capable Europe.

 

 

PIERRE GERMONT

 

Alors viens essayer, si tu insistes

 

 

EUROPE escalade la barrière. Quand elle arrive de l’autre côté, il la rattrape. Tous deux avancent vers le taureau. Une fois qu’ils sont près de l’animal, PIERRE GERMONT prend EUROPE dans ses bras et lui demande de tenir la corne de l’animal. Il fait asseoir la jeune femme, en amazone, sur le dos du taureau, mais l’instant d’après le taureau réagit dans une secousse brusque et PIERRE GERMONT parvient in extremis à rattraper EUROPE. Excité, le taureau se retourne et s’apprête à charger. En vitesse, PIERRE GERMONT et EUROPE regagnent les barrières. Tandis que le taureau fonce sur eux, PIERRE GERMONT aide EUROPE à passer de l’autre côté de la barrière. Il la rejoint après avoir repoussé du pied, la tête de l’animal. Tous deux se trouvent de l’autre côté des barrières de l’enclos. EUROPE semble exprimer la déception.

 

 

PIERRE GERMONT

 

Je te l’avais bien dit… 

 

 

EUROPE (en regardant le sol)

 

J’avais pourtant cru

 

 

PIERRE GERMONT

 

Tu es déçue, en fin de compte, parce que tu te rends compte que je suis quelqu’un de complètement ordinaire, c’est ça ?  Mais il n’y a jamais de vrais dieux dans la réalité. Simplement quelques marionnettes qui peuvent vaguement leur ressembler. Le  langage de la vérité ne doit pas être confondu avec la vérité elle-même. La vie est ainsi

 

 

EUROPE (redressant la tête. / souriant) 

 

La marionnette me suffit, de toute façon. 

 

(Elle regarde les alentours). 

 

Mais tout est tellement confus dans mon esprit. Je ne sais plus départager le faux du vrai.

 

 

PIERRE GERMONT

 

Je sais…

 

 

EUROPE 

 

Cette condition m’épuise. Comme je suis tout le temps à m’interroger, je n’arrive plus à dormir.

 

 

PIERRE GERMONT (en s’approchant d’elle) 

 

C’est pour ça que tu devais rester avec moi. 

 

(Il pose ses mains sur ses hanches). 

 

Je vais t’aider. 

 

Il lui applique un baiser sur les lèvres.

 

EUROPE

 

J’ai envie de dormir.

 

 

PIERRE GERMONT

 

Je vais te trouver un endroit pour que tu puisses récupérer

 

 

  

Scène 251 – MONTAGNE – EXT/JOUR

 

Un paysage légèrement montagneux avec une vue sur une vallée. Des cheminées d’usine, dans le lointain. Un sol rocailleux.  La voiture noire arrêtée près d’un chêne, une portière avant ouverte. Assis au pied du chêne, PIERRE GERMONT écrit une lettre en prenant appui sur un magazine. Sur la banquette arrière, EUROPE est allongée, une couverture posée sur elle. EUROPE se réveille, lève la tête, inspecte le paysage alentour. Elle décide de sortir de la voiture et va à la rencontre de PIERRE GERMONT. 

 

 

EUROPE

 

On est où ?

 

 

PIERRE GERMONT

 

Encore en France. Le nom du patelin ne devrait rien te dire.

 

 

EUROPE

 

C’est maintenant toi qui as décidé de profiter de mon sommeil.

 

 

PIERRE GERMONT

 

Ce n’est pas une bonne surprise, cette fois-ci ?

 

 

EUROPE

 

Et je peux savoir où l’on va ?

 

 

PIERRE GERMONT 

 

Je t’emmène en voyage. Un petit tour d’Europe. Mais avant ça, il me faut rédiger des courriers rébarbatifs pour signaler notre absence.

 

 

EUROPE (en regardant le paysage) 

 

Bien. Dans ce cas, je poserai mes questions plus tard. 

 

 

PIERRE GERMONT (en poursuivant sa correspondance)

 

Tu peux me poser tes questions. Elles ne me dérangeront pas.

 

 

EUROPE 

 

Le tremblement de terre de Naples a bien eu lieu ?

 

 

PIERRE GERMONT 

 

Oui. Il a bien eu lieu. Ce n’est pas une invention de notre part.

 

 

EUROPE

 

C’est curieux… à l’endroit du supposé taureau. Non, je veux dire, à l’endroit supposé du taureau…

 

 

PIERRE GERMONT 

 

Nos machines l’avaient prévu six mois plus tôt. Tu te souviens ?

 

 

EUROPE (regarde PIERRE GERMONT) 

 

Oui, je me souviens. Mais je trouve très étrange qu’il ait eu lieu, à cet endroit même… 

 

 

PIERRE GERMONT 

 

Il y a certains mystères qu’on ne peut pas toujours expliquer.

 

 

EUROPE

 

Et au sujet de Monsieur Castillon ? 

 

 

PIERRE GERMONT (en redressant la tête)

 

Quoi donc ?

 

 

EUROPE

 

Oh, j’ai bien compris que tu n’avais pas pu le foudroyer. Mais ce qui m’étonne le plus, en fin de compte, c’est que ce soit une de tes relations…

 

 

PIERRE GERMONT 

 

Monsieur Castillon a certaines qualités. C’est un homme sensible et raffiné. Notamment. 

 

 

EUROPE

 

Mais il n’est pas du tout comme toi, il me semble…

 

 

 

PIERRE GERMONT

 

Cet homme, dans le passé, a vécu dans l’excès. C’est vrai. Mais il a changé. Tu sais, on dit bien de certains titans, qu’ils se sont convertis à la cause des dieux. 

 

 

 

EUROPE (se tourne vers le paysage)

 

          La vue serait magnifique si on ne voyait pas au fond cette horrible usine…

 

Sa phrase a peine terminée, EUROPE voit l’horizon s’illuminer du jaillissement d’un éclair. Puis un grondement sourd auquel succède la détonation d’une profonde déflagration. 

 

 

EUROPE (tétanisée) 

 

Mais qu’est-ce c’est ? 

 

(Elle regarde à nouveau l’horizon, remarque une épaisse fumée noire. Les cheminées d’usine ont disparu). 

 

Oh, non !

 

 

VOIX de PIERRE GERMONT (hors champ) 

 

Attention à tes mots !

 

EUROPE se retourne et remarque que PIERRE GERMONT est debout dans son dos, son courrier tenu dans une main.

 

EUROPE 

 

Mais… Le ciel est bleu !

 

 

PIERRE GERMONT 

 

Et bien, apprends que c’est possible. Même dans un ciel bleu. 

 

PIERRE GERMONT s’éloigne le temps de replier sa lettre et de déposer ses affaires dans la voiture. 

 

 

EUROPE (le rejoint) 

 

Comment une telle chose a pu arriver ?

 

 

PIERRE GERMONT 

 

Tu connais les quatre éléments…

 

 

EUROPE

 

Les quatre éléments ? Eau, air, feu, terre… C’est ça ?

 

 

PIERRE GERMONT 

 

Un nuage, qu’est-ce que c’est ? De la vapeur d’eau. Tu as donc déjà trois éléments combinés sur les quatre : eau, air, feu. Quel est le quatrième élément manquant ?

 

 

EUROPE 

 

La terre, évidemment.

 

 

PIERRE GERMONT 

 

Tu vois. C’est tout simple. Et comment ce quatrième élément va-t-il pouvoir se combiner aux trois autres ?

 

 

EUROPE 

 

Avec  la foudre qui donne l’éclair, c’est ça ? 

 

 

PIERRE GERMONT (en se rapprochant d’EUROPE) 

 

Quand ces éléments cherchent à se rencontrer, il s’en dégage une puissante énergie qui les sépare. Sans quoi…

 

 

EUROPE 

 

Ils fusionnent.

 

 

PIERRE GERMONT

 

La Création ne serait qu’éphémère…

 

 

EUROPE (en regardant l’horizon) 

 

Ce qui veut dire que l’orage est une force créatrice et non pas destructrice. Et pourtant…

 

 

PIERRE GERMONT

 

Oui, pourtant, dans la réalité, c’est une force destructrice. Mais la vérité n’est pas la réalité. 

 

 

EUROPE (regarde son interlocuteur dans les yeux)

 

Mais l’orage, ce n’est quand même pas pareil que le langage. Même si… tout peut-être langage, comme on me l’a expliqué

 

(Elle pose sa main sur son buste, la fait remonter en une lente caresse.) 

 

Cela fait des mois que je me sens séduite par un homme. Mais je ne sais toujours pas qui il est. 

 

 

PIERRE GERMONT se penche et embrasse sa partenaire. Puis il prend son poignet.

 

 

PIERRE GERMONT 

 

On va y aller. Je vais te faire une expérience.

 

 

EUROPE 

 

Quelle expérience ?

 

 

PIERRE GERMONT (avec une expression de malice)

 

Tu vas voir…

 

 

 

Scène 252 –  VOITURE PIERRE GERMONT – INT/JOUR (avec alternance EXT/JOUR)

 

Voiture. Alors qu’ils roulent PIERRE GERMONT observe, dans des coups d’œil répétés, l’évolution du ciel. A travers le pare-brise, de gros amoncellements nuageux qui modifient la clarté du jour. La voiture monte une route de montagne de plus en plus escarpée. La route se rétrécit et serpente de plus en plus. Le ciel continue de s’assombrir. Des grondements d’orage. PIERRE GERMONT place la voiture le long d’une falaise, coupe le moteur et met le frein.

 

 

PIERRE GERMONT 

 

Ici, ça devrait aller. 

 

 

 

Scène 253 – BORD DE  FALAISE –  EXT/JOUR.

 

Voiture garée le long de la falaise. PIERRE GERMONT et EUROPE sortent du véhicule. PIERRE GERMONT va derrière la voiture, ouvre le coffre, sort un curieux pic en fer muni de lamelles. 

 

 

EUROPE 

 

Qu’est-ce que c’est ? 

 

(Elle met la main sur sa bouche). 

 

Mais oui, c’est le curieux bâton dont m’avait parlé Monsieur Castillon ! C’est quand il avait été hospitalisé.

 

 

PIERRE GERMONT 

 

Cela s’appelle « un foudre ». 

 

PIERRE GERMONT prend la main d’EUROPE pour la conduire sur un sentier escarpé. Nouveau grondement d’orage. EUROPE, de peur, lâche la main.

 

 

EUROPE

Non… Vas-y tout seul… Moi, je préfère regarder d’ici.

 

 

PIERRE GERMONT 

 

Tu ne risques rien…

 

 

EUROPE

 

Pourquoi m’imposer cette expérience ? 

 

 

PIERRE GERMONT 

 

Tu vas le savoir après

 

(Il tend une main, insiste). 

 

Allez… Un peu de courage… Tu vas voir. Ça va bien se passer… 

 

EUROPE prend la main de PIERRE GERMONT et se résigne à le suivre. Ils avancent sur la pente raide du sentier.

 

 

 

Scène 254 – SOMMET MONTAGNE – EXT/JOUR

 

Sommet d’une montagne. PIERRE GERMONT et EUROPE arrivent sur le sommet. Un espace nu duquel dépasse la pointe d’un sapin. Une partie de cet espace est occupé par de gros rochers. Le ciel est envahi de nuages sombres. De nouveaux grondements d’orage. 

 

 

 

PIERRE GERMONT (inspecte le ciel, puis le lieu)

 

Cet endroit devrait convenir. 

 

(Il indique à EUROPE les rochers)

 

Vas-y. Mets-toi là…

 

 

 

EUROPE (immobile)

 

J’ai peur…

 

 

 

PIERRE GERMONT

 

Tu as bien envie de savoir jusqu'où vont mes capacités, non ?

 

 

 

EUROPE (en montrant les rochers)

 

Je ne tiens pas à monter ici…

 

 

 

PIERRE GERMONT

 

C’est un mauvais réflexe… C’est par le sol que tu risques surtout d’être foudroyée. Si je te demande de monter, c’est que j’ai de bonnes raisons de te le demander. 

 

(EUROPE se résigne à monter sur les rochers). 

 

De toute façon, maintenant, tu ne peux plus échapper à l’expérience. 

 

(Il pose son regard sur la cime du pin qui dépasse). 

 

Je vais choisir cet arbre.

 

 (Il regarde EUROPE, qui est arrivée en haut du rocher). 

 

 

EUROPE (replie ses jambes) 

 

Comme ça ?

 

 

PIERRE GERMONT

 

Oui. Comme ça… 

 

 

PIERRE GERMONT choisit un endroit sur le sol, pour planter son foudre. Puis il incline la pointe du foudre vers celle de l’arbre.

 

 

EUROPE

 

Il faut attendre longtemps ?

 

 

PIERRE GERMONT

 

Non. Je te donnerai le signal, de toute façon… Pour l’instant, j’essaye de tracer une colonne ionique…

 

 

EUROPE

 

Alors, c’est scientifique…

 

 

PIERRE GERMONT

 

La science, elle, n’a pas de limite. Sinon, cela voudrait dire qu’elle devrait un jour, s’arrêter de progresser… 

 

 

PIERRE GERMONT finit de fixer le foudre. Puis il se sauve, court jusqu’au rocher et rejoint EUROPE.

 

 

PIERRE GERMONT

 

Ça va être maintenant. Bouche-toi les oreilles.

 

En même temps qu’une bruyante déflagration, une lumière aveuglante, qui masque tout le paysage. EUROPE et PIERRE GERMONT, sous l’effet du blast, sont projetés en arrière.

 

 

PIERRE GERMONT (en se redressant) 

 

Ça va…

 

 

EUROPE

 

C’était étrange… Toute cette lumière, si blanche. 

 

(Elle se redresse à son tour). 

 

J’espère au moins que c’est la dernière des expériences que tu m’imposes…

 

 

PIERRE GERMONT

 

C’était la dernière, promis.

 

 

EUROPE

 

J’ai vraiment eu très peur. Pourquoi cette expérience m’était indispensable ?

 

 

PIERRE GERMONT

 

C’est à toi de comprendre…

 

 

EUROPE

 

C’est pour mieux savoir qui tu es ?

 

 

PIERRE GERMONT

 

Rappelle-toi… Tu me reprochais de t’avoir trompée.

 

 

EUROPE (en regardant devant elle)

 

Je ne suis pas la personne la plus trompée. C’est ça ? 

 

 

PIERRE GERMONT

 

Oui. La situation était même inverse. Toi, tu savais déjà. Ce sont les autres que j’ai dû tromper. Toute l'équipe du Centre de Recherche n'a pas su avoir autant de lucidité que toi.

 

 

EUROPE

 

Alors, pourquoi les autres sont-ils trompés, dans ce cas ?

 

 

PIERRE GERMONT

 

Il n’est pas toujours facile, pour l’esprit, d’admettre certaines vérités. On préfère trouver refuge dans des pensées un peu confortables…

 

 

EUROPE 

 

Tu veux dire que tu ne les as pas trahis. 

 

 

PIERRE GERMONT

 

Oui. Ils avaient tous les éléments pour savoir…

 

 

EUROPE

 

Oui, pour savoir, se faire un jugement et un esprit critique…

 

La pluie se met à tomber.

 

 

PIERRE GERMONT

 

Oui. Tout à fait.

 

 

EUROPE

 

Il me semble déjà avoir entendu ce discours…

 

 

PIERRE GERMONT (se lève et tend une main)

 

Il faut nous mettre à l’abri… 

 

 

 

Scène 255 – VOITURE PIERRE GERMONT PARC HÔTEL – EXT/NUIT

 

La voiture roule dans la nuit. Elle traverse les grilles d’un luxueux parc et arrive devant le bâtiment imposant d’un grand hôtel, aux fenêtres éclairées.

 

 

 

Scène 256 –  VOITURE PIERRE GERMONT PARC HÔTEL – EXT/NUIT

 

La voiture se gare. PIERRE GERMONT et EUROPE sortent de la voiture. PIERRE GERMONT prend EUROPE par la taille. Au moment où le couple s’approche du perron, des lumières extérieures s’allument automatiquement. Musique.

 

 

 

Scène 257 – HALL HÔTEL – INT/NUIT

 

Hall de l’hôtel de luxe. L’hôtel semble désert. EUROPE regarde avec émerveillement son haut plafond. PIERRE GERMONT s’approche de l’accueil. Une réceptionniste saisit une clef et se lève. 

 

 

 

Scène 258 – SALON-BAR HÔTEL –  INT/NUIT

 

Hôtel de luxe. Salon bar. PIERRE GERMONT et EUROPE sont installés sur la banquette d’un salon bar. Devant eux, des coupes de champagne remplies. Ils lèvent leurs verres pour trinquer et s’embrassent. Un pianiste leur joue un air. Ils sont seuls dans le salon. Musique.

 

 

 

Scène 259 – CHAMBRE HÔTEL – INT/NUIT

 

Hôtel de luxe. Chambre. Une pièce cossue avec un coin bibliothèque et un lit posé sur une estrade. EUROPE inspecte la pièce d’un rapide coup d’œil, puis se tourne vers PIERRE GERMONT. Un regard brillant.  PIERRE GERMONT referme derrière lui, la porte de leur chambre. Il s’avance vers EUROPE, l’étreint avec force et l’embrasse avec fougue. Il la déshabille, commence par dévêtir ses épaules. Il l’entraîne vers le lit. Tous deux basculent sur le lit. Il enlève sa chemise et étreint de nouveau sa partenaire.

 

 

 

Scène 260 – VOITURE PIERRE GERMONT ARRIVÉE HONGRIE –  EXT/JOUR 

 

La voiture roule dans la campagne, en direction de la frontière hongroise. Un panneau : « Bienvenue en Hongrie », en hongrois (traduire avec sous-titres). La voiture passe devant le panneau. Musique. 

 

 

 

Scène 261 – CENTRE-VILLE BUDAPEST –  EXT/JOUR

 

Budapest. EUROPE et PIERRE GERMONT visitent la ville. Ils marchent le long du Danube. Musique.

 

 

 

Scène 262 –  BAINS THERMAUX HONGRIE – EXT/JOUR

 

Bains thermaux de Széchenyi. Un bâtiment néobaroque. Des bassins circulaires investis par les baigneurs et desquels s’échappent des vapeurs de fumée. EUROPE et PIERRE GERMONT se prélassent dans un des bains. Musique.

 

 

 

Scène 263 – BATEAU de CROISIERE –  EXT/NUIT

 

Bateau de croisière sur le Danube. EUROPE et PIERRE GERMONT, enlacés sur le pont du bateau, regardent le ciel.

 

 

 

Scène 264 – BATEAU de CROISIERE –  INT/NUIT

 

Bateau de croisière. Dans le bateau, un restaurant. PIERRE GERMONT invite EUROPE a s’asseoir à une table où sont dressés deux couverts et s’assoit à son tour, en face d’elle. Chacun prend le menu posé sur l’assiette. Au milieu des tables et des convives, sur une petite estrade, un groupe de tsiganes joue un air joyeux et entraînant. 

 

 

EUROPE (fronce les sourcils) 

 

Je ne comprends rien à ce qui est écrit. 

 

(Elle montre le menu à PIERRE GERMONT). 

 

PIERRE GERMONT 

 

(lit en posant un doigt sur le texte du menu)

 

Goulache. C’est une soupe locale. Foies d’oie poêlés accompagnés de lamelles de pomme de terre et de tomates au paprika…

 

 

EUROPE (en abaissant le menu) 

 

La diversité des langues, pour toi, n’est jamais un obstacle.

 

 

PIERRE GERMONT

 

La diversité est une richesse. La vie serait fade s’il n’existait qu’une seule couleur. Et l’Europe serait ennuyeuse si elle n’était qu’un seul pays. 

 

 

En dernier plan, le groupe de tsigane qui joue. La musique devient plus forte.

 

 

 

Scène 265 – COULOIR BÂTIMENT de LINGUISTIQUE – INT/JOUR

 

Bâtiment de linguistique. Couloir du bureau de PIERRE GERMONT. Un homme typé méditerranéen, le FRÈRE d’EUROPE, avance dans le couloir en direction de la porte du bureau. Après un instant d’hésitation, il frappe à la porte. 

 

 

VOIX de JACQUES

 

 Entrez !

 

 

Scène 266 – BÂTIMENT de LINGUISTIQUE / BUREAU du DIRECTEUR – INT/JOUR

 

Bâtiment de linguistique. Bureau de PIERRE GERMONT. Le FRÈRE d’EUROPE entre. JACQUES se lève.

 

 

Le FRÈRE d’EUROPE

 

Bonjour Monsieur. Je ne vais pas vous déranger longtemps. Je suis le frère d’Europe. Si je viens ici, c’est que je n’ai plus de nouvelle de ma sœur depuis longtemps. Ni moi, ni sa mère, ni le reste de sa famille.

 

 

JACQUES

 

Aux dernières nouvelles, votre sœur allait bien. Quand elle est partie d’ici, elle était accompagnée.

 

 

Le FRÈRE dEUROPE

 

Et vous savez où ils sont actuellement ?

 

 

JACQUES

 

Non…

 

 

Scène 267 – VUE AÉRIENNE DE LA PORTE DE FER EN ROUMANIE – EXT/JOUR 

 

 Dans une vue aérienne, la voiture noire roule sur une route qui longe le Danube. La voiture longe « La Porte de Fer » (en Roumanie).

 

 

VOIX OFF de JACQUES

 

On sait qu’ils ont été en Hongrie. Puis ils ont continué à suivre les méandres du Danube. Ils ont atteint la « Porte de Fer », qui sépare les Carpates et les Balkans. Ils sont entrés en Roumanie...

 

 

 

Scène 268 – BÂTIMENT de LINGUISTIQUE BUREAU du DIRECTEUR –  INT/JOUR

 

Bâtiment de linguistique. Bureau de PIERRE GERMONT. JACQUES parle au FRÈRE d’EUROPE. 

 

JACQUES 

 

Certains prétendent les avoir vus continuer leur route jusqu’à la Mer Noire et c’est là que nous avons perdu leur trace. Enfin, il semblerait, d’après une certaine rumeur, qu’ils auraient traversé l’Ukraine pour atteindre les contrées de l’Oural. Mais comme je vous le dis, ce ne serait qu’une rumeur. 

 

 

Le FRÈRE d’EUROPE

 

Je vous remercie Monsieur. C’est tout ce que je souhaitais savoir. 

 

(Il appuie sur la poignée de la porte). 

 

Je vous laisse travailler. Au revoir, Monsieur. 

 

 

 

Scène 269 –  BÂTIMENT de LINGUISTIQUE BUREAU du DIRECTEUR – INT/JOUR

 

Bâtiment de linguistique. Couloir du bureau de PIERRE GERMONT. Le FRÈRE D’EUROPE sort et ferme la porte. Le dernier plan est celui de la porte fermée. Musique. 

 

 

 

Scène 270 – Images de l’EUROPE

 

Images du Parlement européen. Derrière des vitres, des traducteurs, casques sur l’oreille, traduisent les messages en différentes langues européennes. Images de lieux symboliques en vues aériennes / plans en plongée : Londres, Venise, Madrid, Wien, Le Connemara, etc. Texte en surimpression : « D’origine crétoise, le mythe des amours de Zeus et d’Europe est l’un des plus vieux mythes de l’histoire. Il est né avec l’histoire d’un continent et lui a légué un nom : Europe ». En enchaînement, le générique de fin.